Suite aux conclusions prises, sans concertation avec la société civile, par deux groupes de travail, le président du Sénat, Gérard Larcher, a annoncé l’adoption par le Bureau d’un train de réformes visant à moderniser la chambre haute du parlement. Si globalement le Sénat va s’aligner sur les récents changements de l’Assemblée nationale en matière de frais de mandat, de transparence financière des groupes politiques ou de la réserve parlementaire, les évolutions proposées pour limiter l’emploi des délégations de vote ou pour encourager la présence via des sanctions financières restent encore trop timorées.
Un député émargeant en commission
Pour assurer une meilleure implication des sénateurs dans le travail parlementaire, le Bureau a choisi le même outil que l’Assemblée : des sanctions financières. Beaucoup plus dissuasive économiquement parlant qu’au Palais Bourbon puisque les sénateurs trop souvent absents pourront perdre jusqu’à 4 400 € par mois (contre 300 à 1 000 € pour les députés), cette annonce risque malheureusement d’échouer à combattre l’antiparlementarisme faute d’un volet transparence.
En effet, l’article 15.3 du règlement du Sénat prévoit déjà, depuis des années, des sanctions particulièrement sévères à l’égard des absents en commission, mais il n’a encore jamais été mis en application… De même à l’Assemblée, les sanctions relatives à la présence en commission votées en mai 2009 n’avaient été mises en application qu’en février 2010, suite à la publication de notre étude sur leur application théorique. La reconduction de cette étude aux étés 2010 et 2011 avait permis de montrer que la publicité des sanctions a un impact positif sur l’implication des députés sanctionnés. Sans transparence sur l’application de ces sanctions, il restera malheureusement difficile de convaincre les citoyens et restaurer la confiance.
Pour mettre en œuvre ces sanctions, la présence des sénateurs devra à compter du mois d’octobre être relevée, non seulement en commission comme c’est le cas au Journal Officiel depuis très longtemps, mais également en hémicycle, ce qui marque une première en France. La publication de ces relevés de présence sur le site du Sénat n’est pas clairement indiquée au communiqué du Bureau mais Gérard Larcher l’a annoncée oralement lors de sa conférence de presse. Cela permettra par exemple d’enrichir les données de NosSénateurs.fr. Il serait cependant un peu dommage de limiter ces relevés aux seules séances d’explications de vote et de questions aux gouvernement, bien peu représentatives du vrai travail législatif. Quitte à déployer un tel dispositif, espérons qu’il sera appliqué à l’ensemble des séances publiques !
Afin de contrôler par ailleurs leur participation aux votes des lois, le Sénat enregistrera désormais la liste des sénateurs présents aux scrutins finaux des textes discutés en s’assurant du respect de l’article 27 de la Constitution, qui interdit aux parlementaires de voter par délégation pour plus d’un de leurs collègues. Comme il a déjà commencé à le faire, le site du Sénat publiera donc désormais pour les votes solennels le détail de l’usage des délégations par qui et pour qui. Malheureusement, ces quelques votes symboliques ne représentent qu’une minorité des scrutins dits publics, et la pratique du « vote groupé » permettant à un sénateur de voter pour une centaine de ses collègues absents persistera pour les scrutins publics sur les amendements : le Sénat poursuivra sans sourciller son irrespect quotidien de la Constitution…
Concernant la transparence financière, la plus belle avancée concerne les groupes politiques, qui devront comme à l’Assemblée se constituer en association, et dont les comptes seront publiés sur le site du Sénat dès 2015. La prise en compte des remarques de la Cour des Comptes, et notamment la promesse de s’assurer de la véracité et la lisibilité par le citoyen du budget du Sénat, est également une bonne nouvelle. Mais l’opacité du budget restera la règle : aucun engagement n’est pris pour publier les comptes détaillés sur le site en Open Data. Le « pré-test auprès d’un panel de citoyen » avant publication reste très flou : sans une garantie d’indépendance et une définition de droits clairs, on voit mal comment ce « panel » pourrait influencer positivement la lisibilité et la publication des comptes. Si l’abandon des prêts immobiliers accordés par le Sénat aux sénateurs pour l’achat de leur permanence dès la fin 2015 va clairement dans le bon sens, le reste des mesures relatives à l’indemnité de frais de mandat, calquées sur celles de l’Assemblée, restent bien trop légères faute de présenter le moindre mécanisme de contrôle ou de transparence.
Le renforcement de la politique numérique est enfin une très bonne nouvelle : le Sénat s’aligne sur l’Assemblée en matière d’Open Data pour la réserve parlementaire et proposera bientôt en ligne par ailleurs l’annuaire des collaborateurs parlementaires ainsi qu’une synthèse d’activité individuelle pour chaque sénateur. En revanche, alors que l’Assemblée a pris une belle longueur d’avance sur le Sénat et l’exécutif en réformant ses dispositifs de transparence du lobbying et ses politiques de consultation, le Président du Sénat semble avoir totalement oublié la concertation avec la société civile et la transparence du dialogue avec les représentants d’intérêts. M. Larcher, votre nouveau mandat commence tout juste, ne manquez pas l’occasion d’aller au bout de votre démarche pour un Sénat réellement modernisé !
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